Alors qu'un mini-dossier de deux pages est présenté aujourd'hui dans La Presse, je me pose de plus en plus de questions à propos du protocole de Kyoto et de son application au Canada.
Comme j'écrivais dans un chronique précédente, pour plusieurs électeurs, le protocole est un concept flou mais les objectifs sont très précis. Le Canada doit abaisser ses émissions de gaz à effet de serre de 6% en bas de son niveau de 1990. Si cet objectif est atteint, ce sera au prix de nombreux changements, puisque que depuis, les émissions ont augmenté de 24%. La combinaison de ces deux chiffres exige donc des réductions de 30.2% par rapport au niveau actuel. Et cela doit se faire d'ici 2012.
Je crois que les électeurs devraient comprendre l'ampleur de la tâche qui les attend.
-Comment allons-nous atteindre l'objectif fixé? (on ne sait pas)
-Quelles sont les mesures concrètes proposées par le gouvernement fédéral? (on ne sait pas)
-Est-ce que des mesures incitatives, communautaires, de proximité seront suffisantes? (certainement pas, la bicyclette c'est bon pour la santé mais quand l'usine du coin crache du CO2 à pleines cheminées...)
-Est-ce que le gouvernement fédéral ne devra-t-il par à un moment donné introduire des mesures plus contraignantes pour les plus grands émetteurs de GES, c'est-à-dire les entreprises qui oeuvrent dans le transport, les mines, l'extraction et la transformation du pétrole? (c'est ce qu'on veut éviter à tout prix, et pas seulement en Alberta)
-Est-ce que ces éventuelles mesures vont faire baisser la compétitivité des entreprises canadiennes face aux entreprises américaines non-soumises au protocole? (peut-être, ce qui n'est pas une perspective rose)
Face à toutes ces questions, je peux comprendre Stephen Harper de ne pas appuyer le protocole de Kyoto. Au-delà des conséquences économiques qui pourraient être lourdes pour l'Alberta qui, qu'on le veuille ou non, s'affirme de plus en plus comme le moteur économique du Canada, Harper voit que les objectifs de Kyoto sont irréalistes pour le Canada. Pas besoin d'être un spécialiste pour prévoir que nous n'atteindrons pas notre objectifs en 5 ans. Pas dans un pays qui est dépendant du chauffage à cause de l'hiver, du transport à cause de la géographie et du secteur manufacturier à cause de nos matières premières. L'idée de Harper, c'est d'arriver avec notre propre échéancier. Sauf qu'il faudra arriver avec un plan, des idées, des mesures et ce, dans un délai raisonnable, sinon le Canada se retrouvera la risée de la communauté internationale.
Dans le même ordre d'idée, on apprend que les Québécis appuie massivement Kyoto à 89% Le sondage a été commandité par Greenpeace. Qui peut être contre la vertu? Qui peut être POUR la pollution? J'aimerais bien voir les questions et j'aimerais aussi demander aux ''sondés'' s'ils sont prêts à payer leur essence plus chère ou à voir leurs impôts augmenter pour soutenir le transport en commun, tout ça dans la perspective d'appuyer Kyoto?
Et si nous sommes d'ardents défenseurs de Kyoto au Québec, comment se fait-il que le gouvernement québécois n'ait pas de plan d'action en matière de lutte contre les changements climatiques? Le ministre de l'Environnement a beau se défendre sur le dos du gouvernement fédéral mais cette lutte peut se faire sans l'aide de personne. Pourquoi attendre après les autres? Si l'objectif de Kyoto est noble et est partagé par la majorité de la population, pourquoi ne pas agir maintenant? Comment se fait-il que le PQ n'avait pas de plan? Le protocole a été négocié en 1990, ça fait 16 ans et toujours pas de plan!
Mais je vois un peu la stratégie du gouvernement québécois. Puisque les Québécois sont les moins grands émetteurs de GES du Canada, pourquoi serions-nous contraints par des mesures visant à abaisser l'émission des GES des autres? Il faut arriver à une entente qui sera profitable pour nous dans le marché énergétique nord-américain. Du genre, si on réussit à baisser notre émissions de GES, elles pourraient compter en double puisque nous sommes déjà à un niveau très bas, et être compensés financièrement en ce sens. On essaie donc à Québec de monnayer les efforts de lutte dans le cadre du plan fédéral. Pour des gens qui ont supposément l'environnement et Kyoto à coeur, je crois que c'est un peu hypocrite.
2006/02/16
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